20 juillet 2008

Hôtel Saint-Pol

L'Hôtel Saint-Pol fut construit entre 1361 et 1364 par le roi Charles V dans les "marais" qui se situaient rive droite de la Seine, derrière le couvent des Célestins, près de la Porte de Vincennes. C'est l'architecte Raymond du Temple qui en supervisa les travaux.

Le roi se plaisait beaucoup en cet endroit, et il y fit un aménagement continuel du parc et des demeures somptuaires. Le souverain ne supportait pas les odeurs pestilentielles que dégageait le centre-ville ; il appréciait l'Hôtel Saint-Pol pour son grand calme.

Outre de riches décorations, une ménagerie y fut même construite. Des animaux exotiques comme des lions ou des singes y avaient été amenés et étaient entretenus à grands frais. Plusieurs salles étaient destinées aux banquets et autres festivités données par le roi. Des chambres étaient réservées aux invités, d'autres au roi et à sa famille. Le roi et la reine disposaient de leurs propres bâtiments. Les pièces étaient toutes luxueusement ornées de bois précieux, de peintures, d'orfèvrerie. Chaque pièce fut agrémentée selon les goûts personnels du monarque. De plus, cet hôtel renfermait une remarquable collection de livres précieux que le roi aimait à rassembler, dont ceux de son père Jean II qui fut également grand amateur de livres. Cette collection de livres permettra à Charles V de créer la Bibliothèque royale qui deviendra quelques siècles plus tard la Bibliothèque nationale de Paris.

Quant aux jardins, outre la ménagerie, furent également construits un aquarium et des volières. Le parc était immense. Huit jardins furent dessinés, ceux-ci étaient séparés par des galeries qui reliaient entre elles chacune des habitations.

Charles VI, son fils y passera également une grande partie de son temps, profitant du calme pour se reposer, notamment après ses crises et ses longues maladies. Son climat sain lui éviteront, selon ses dires, quelques maladies désagréables, mais surtout lui fera retrouver une bonne santé.

C'est dans cet Hôtel Saint-Pol que se déroula le 28 janvier 1393 la tragédie du Bal des ardents.

Il ne reste aujourd'hui plus aucun vestige, ni aucune représentation de cet ensemble.

11 juillet 2008

les ponts habités

le Pont aux Meuniers Au XIVème siècle, à Paris, il y avait cinq ponts qui enjambaient la Seine depuis l'île de la Cité : trois vers la rive droite, et deux vers la rive gauche.

Le plus en aval, rive droite, portait le nom de Pont aux Meuniers, car il était équipé de moulins mus par la force de la rivière (voir l'illustration). Le suivant, le pont au Change, avait prit ce nom en 1141, lorsque Louis VII ordonna aux changeurs (les banquiers) de s'y établir. Le suivant était le Pont Notre-Dame. De l'autre côté se trouvait le Petit Pont, en amont, puis le Pont Saint-Michel en aval.

Ces ponts étaient tous garnis de maisons, d'ateliers ou de boutiques. Ils formaient de véritables rues traversant le fleuve. Artères commerçantes par définition, ces ponts étaient très fréquentés, et l'étroitesse de la voirie qui restait libre entre les constructions les rendait encombrés en permanence. Assez fréquemment les façades intérieures de ces ponts étaient couvertes de nouvelles décorations (permanentes ou temporaires), particulièrement lors de célébrations ou de victoires, traités de paix, naissances royales, couronnement, etc..

De plus, leurs construction en bois (et non en pierre) ainsi qu'une certaine négligence dans leur entretien a causé l'effondrement de plusieurs de ces ponts habités. Ils furent progressivement reconstruits en pierre.

1 juillet 2008

Le Château de Vincennes

Le Château de Vincennes est le plus important château fort royal français subsistant, et par la hauteur de son donjon (50 mètres), il est la plus haute forteresse de plaine d'Europe.

Les bâtiments médiévaux que l'on peut admirer de nos jours ont été construits sur une courte période, au XIVème siècle.

Les Capétiens prisaient déjà l'endroit. S'il n'en reste rien de visible, des fouilles attestent la présence d'un manoir médiéval qui se trouvait idéalement situé en bordure de l'immense forêt de Vincennes. L'endroit était parfait, pour surveiller Paris, tout en se détendant à la chasse.

Saint-Louis (Louis IX) y est même souvent représenté, rendant la justice sous un chêne. Ce roi diplomate et pieux entreposa même à Vincennes une partie des reliques de la Passion, ramenées de Terre Sainte.

le donjon du château de VincennesMais c'est surtout Jean II qui, de retour d'exil, ordonne la construction d'un gigantesque donjon afin d'asseoir son autorité retrouvée. Le 22 avril 1361, le roi nomme Jean Goupil «payeur des œuvres», c'est-à-dire gestionnaire du financement de la construction de cette tour. Ce que Jean II décide de construire est à la fois une résidence royale, un lieu de protection et un point d'appui militaire aux portes de Paris. Le donjon encore aujourd'hui dans un état remarquable, témoigne du génie de son architecte : Raymond du Temple. Ce programme multiple est alors tout entier dans le donjon et son enceinte : l'enceinte du château, entreprise en 1373, n'était pas prévue à ce stade.

Même si la construction fut achevée en un temps record en 1370, ce qui est remarquable pour une œuvre d'un telle complexité, Jean II n'en profitera pas, étant décédé en captivité à Londres. Ainsi, le donjon étonne par la puissance qu'il dégage de l'extérieur, mais aussi par la finesse et la richesse de sa décoration intérieure. La seule et fine colonne qui soutient les voûtes de chacune des pièces centrales de chaque étage encaisse un poids intelligemment réparti selon de très complexes et astucieux transferts de forces qui ont été récemment mis au jour, lors des travaux de restauration du donjon.

le château de Vincennes en 1380 Le lieu plaisait à Charles V, et il va décider de continuer les travaux, en lançant un autre projet titanesque : clore l'ensemble des bâtiments capétiens et le donjon en une gigantesque enceinte fortifiée. Cette enceinte fut réalisée dans sa totalité (avec ses neuf tours) dans le temps record de 8 ans, ce qui a dû impliquer une logistique de chantier incroyable, étant donné la quantité de pierres qu'il a fallu transporter, tailler et assembler. Il a sans doute dû s'agir du plus grand chantier de construction de toute l'Europe.

Ainsi, en quelques années, pour la construction, on a utilisé environ 260 000 blocs de calcaire d'une hauteur d'un pied, d'une longueur moyenne de 80 cm, d'une épaisseur de 50 à 70 cm : cela signifie l'arrivée en moyenne de 130 blocs par jour ouvrable. Sans compter les matériaux nécessaires pour les parements, les portes, les fenêtres, etc.

Le coût de construction du château fut considérable. Les quelques documents conservés permettent d'affirmer que le chantier, entre 1361 et 1380, coûta au roi plusieurs centaines de milliers de livres, cette énorme somme englobant les travaux proprement dits mais aussi les dépenses liées à l'agrandissement du Bois et aux aménagements intérieurs des constructions.

Car bien que réalisée en un temps très court, la construction fut d'une très grande qualité. Le soin apporté à l'assemblage, à joints fins, des pierres des parements extérieurs du donjon et de son châtelet et surtout de l'enceinte du château, est remarquable.

Enfin, en 1379, Charles V ordonne la construction de la Sainte-Chapelle, pour honorer la mémoire de son aïeul, et protéger les reliques de la Passion. Cependant, le roi meurt l'année suivante, et ce projet n'est pas repris pas son fils, Charles VI, jugeant trop dispendieuses les dépenses faites à Vincennes. La construction en reste au stade de fondation pendant de longues années, avant qu'elle ne reprenne timidement dans les années 1395, sans toutefois être achevée. Le chantier ne fut réellement achevé qu'en 1559 par Henri II.

Pour aller plus loin : chateau-vincennes.fr

27 juin 2008

La Grande Boucherie

Rive droite de la Seine à Paris, lorsque le Grand Châtelet avait encore un rôle défensif, se tenait au nord du bâtiment militaire, une des portes de Paris, qui est devenue, avec l'extension rapide de la population et par homonymie, la place de l'Apport.
Cette place fut longtemps le théâtre de commerces de tous genres, avant que celui ci ne s'organise par les Bouchers.
Entre les rues Saint-Jacques et Saint-Denis, à la place de l'actuelle rue de Rivoli, se construisit, avec l'aval du roi, un imposant édifice. Sa situation extra-muros, mais près d'un axe de passage, répondait à une double considération, tant hygiénique, que pratique.
La grande boucherie du Châtelet (place de l'Apport) La Grande Boucherie comprenait trois niveaux. En premier lieu, les caves où étaient entreposées des instruments, des détritus et même quelques bonnes bouteilles de vin de Bourgogne. Le rez-de-chaussée était surélevé de trois ou quatre marches et présentait des étals disposés le long de deux allées se coupant à angle droit. La lumière provenait de hautes baies dépourvues de vitres. L'éclairage artificiel était interdit : il pouvait donner un faux aspect aux viandes. Enfin, à l'étage était installée une salle des fêtes, pour les intronisation de la corporation des Bouchers, ainsi qu'une petite chapelle privée.

Il s'agissait sans doute de l'un des lieux de contre-pouvoir les plus importants de Paris, face au Louvre (pouvoir royal) et à Notre Dame ou à la Sorbonne (pouvoir religieux). Les bouchers étaient en effet les marchands les plus riches et les plus puissants de Paris.

L'église attenante à la Grande Boucherie portait d'ailleurs l'empreinte de la puissante corporation : Saint-Jacques-de-la-Boucherie.

Aubry Haussecul, personnage fictif du roman, est un des bouchers qui y travaille, de père en fils depuis plusieurs générations. Son nom provient d'un mélange entre deux personnages historiques : un boucher du XIIIème qui a donné son nom à la rue Aubry-le-Boucher, dans le IVème arrondissement, et un certain Guillaume Haussecul, riche boucher du XVème siècle qui est mentionné dans plusieurs papiers pour avoir fait construire une chapelle attenante à sa boucherie.

Pour aller plus loin, on consultera le très complet site de sur l'histoire de la Grande Boucherie du Châtelet : grande-boucherie.chez-alice.fr

24 juin 2008

Paris, quatorzième siècle

Plan de Paris - 1383 Au quatorzième siècle, la ville de Paris est la plus peuplée d'Europe. Avec ses 200.000 habitants, elle surpasse largement Londres (50.000), Moscou ou Rome.

La ville est fortifiée à cause des menaces pressantes des Anglais. Le roi Charles V fait construire une enceinte plus large que celle de Philippe Auguste, et qui englobe alors l'ensemble des actuels 3e et 4e arrondissements, sur la rive droite. La rive gauche restant confinée dans la muraille de Philippe Auguste.

On distingue sur la carte ci-contre (datant de 1383) les enceintes successives (en pointillés), ainsi que les grands axes de communication nord-sud et les ponts sur la Seine. On remarquera également que seule l'île de la Cité est construite. L'actuelle île Saint-Louis étant même coupée en deux îles, qui ne seront réunies qu'une centaine d'années plus tard.

La ville est organisée en trois grandes parties, séparées physiquement par la Seine :

  • rive droite, se trouvent les artisans, les commerçants et les riches bourgeois, organisés en corporations.
  • rive gauche, se trouve le pouvoir religieux, avec de grandes abbayes comme Saint-Germain des Prés (encore hors les murs de Paris au XIV ème), ou les facultés d'art et de science, comme la Sorbonne.
  • au centre et le long de la Seine se dresse le pouvoir royal, avec, d'aval en amont, le palais royal du Louvre, le palais de Justice sur l'île de la Cité, le Grand Châtelet, la cathédrale Notre Dame, l'hôtel Saint-Paul où loge le roi et la reine, et enfin la Bastille dont la construction démarre à la fin du XIVème.

Au quatorzième siècle, en France, les temps sont troubles, surtout depuis l'accession controversée au trône de Philippe VI en 1328, en vertu d'une loi salique bien opportune. De plus, en ville comme dans les campagnes, on se remet à peine de la peste noire de 1348 qui a décimé près d'un quart de la population. Des émeutes éclatent à Paris (la Jacquerie, en 1358, voit l'avènement d'Etienne Marcel), et le roi Jean II est fait prisonnier par les Anglais à la bataille de Poitiers en 1356. La France est désorientée, appauvrie, affaiblie et malade.

Période décriée de l'histoire de France, elle brille néanmoins par quelques uns de ses artistes ou de ses intellectuels(Nicole Oresme, Christine de Pisan, etc.). Des chefs d'oeuvres sont créés, sur le plan architectural, mais aussi en sculpture, peinture, et littérature...